PACTE : compte-rendu des réunions en visio des 22 et 28 juin 2023

mercredi 5 juillet 2023
par  Secteur politique éducative

Le SNES-FSU Versailles a organisé les 22 et 28 juin 2023 des réunions en visio ouvertes à toutes et à tous. De nombreux collègues de toute l’académie s’y sont connectés et ont pu échanger avec les militants.

Le pacte est un dispositif à combattre pour plusieurs raisons :
• C’est une attaque contre nos statuts.
• C’est un outil pour nous faire travailler plus et nous priver de notre liberté professionnelle.
• Ce n’est pas une revalorisation.
Le SNES a quitté début mars la réunion sur le pacte en signe de refus. Il n’est pas seul car toute l’Intersyndicale a quitté la réunion et des actions intersyndicales ont eu lieu depuis.

INFO FONDAMENTALE : Aucun texte officiel n’est encore paru, donc ce dispositif n’a pas encore d’existence légale, ni de format fixe. Les directives sont également amenées à évoluer d’ici la rentrée

Un contexte de déclassement salarial :

En 1980 un professeur certifié en début de carrière gagnait 2.2 fois le SMIC. Aujourd’hui c’est 1.24 fois.
Selon un rapport de 2021 du Sénat, les professeurs ont perdu entre 15 et 25% de pouvoir d’achat en 20 ans.
Un professeur français gagne aujourd’hui 16% de moins que la moyenne de l’OCDE.

Des promesses non tenues : les annonces ministérielles

  • Septembre/décembre 2023 : 935 millions d’euros pour les rémunérations, dont 635 pour la partie sans conditions (1,9 milliards en année pleine) et 300 millions pour le pacte.
    La réalité des besoins
  • Pour augmenter de 10 % la rémunération de tous les personnels de septembre à décembre 2023, il faudrait engager 1,2 milliards et 3,6 milliards en année pleine.
  • La promesse de campagne électorale de Macron : un investissement massif pour permettre une augmentation des salaires de 10% dès 2023 pour tous.tes sans conditions.
  • Un discours repris par Pap N’Diaye dans plusieurs déclarations. Des concertations annoncées pour la revalorisation générale de la rémunération des enseignants.

La revalorisation salariale par le socle 
Les salaires hors Pacte sont revalorisés selon plusieurs axes
• La prime d’attractivité pour les nouveaux collègues échelons 2 à 7 serait revalorisée : de 667 euros à 1521 euros. Mais cette revalorisation lisse les salaires en début de carrière, car si le salaire augmente avec l’ancienneté, la prime baisse (donc le revenu reste le même pendant de longues années malgré l’ancienneté).
• Le doublement de l’ISOE part fixe pour tout le monde.
• L’alignement des indemnités pour sujétion particulière des professeurs documentalistes sur l’ISOE (2250 euros). Les indemnités des psy-EN évoluent comme l’ISOE .
• Sur les carrières : le ratio hors classe passe de 18 à 23% (échelon spécial à l’ancienneté, à terme suppression des viviers et décontingentement de la classe exceptionnelle)

L’arnaque des « mesures socle »
• Ce sont des mesures indemnitaires et non indiciaires, DONC QUI NE COMPTERONT PAS POUR LES RETRAITES.
• Cette revalorisation par le socle est bien inférieure aux 10% promis : on est à 5.5% en moyenne, et à partir de l’échelon 8, cette augmentation est dérisoire dans un contexte d’inflation.
• Les 200/220 euros promis par Macron devant les médias ne concerneront donc que 14.5% des professeurs.
• Pour les enseignants de plus de 15 ans d’ancienneté (soit environ 70% des collègues) l’augmentation sera de 95 euros net par mois, soit à peine + 4.2% de hausse par rapport à 2022.
• Dans toute la fonction publique, une augmentation du point d’indice aura lieu à partir de juillet. Elle est de 1.5% alors que l’inflation est de 5.1%.
NB : Pour rattraper ce que nous avons perdu en pouvoir d’achat avec le gel du point d’indice, il faudrait une augmentation de 20% !

Le pacte, un projet politique
Macron a tenu un discours contradictoire en finissant par avouer qu’il n’y aurait pas revalorisation pour ceux qui ne « feraient pas d’efforts », nourrissant ainsi la vision mensongère des professeurs qui ne travaillent pas assez, alors que plusieurs enquêtes montrent que le temps de travail hebdomadaires des enseignants se situe déjà à environ 42h.
C’est le retour du « travailler plus pour gagner plus », en contradiction avec la promesse des 10% sans conditions.
Macron a avancé dans le projet seul, sans les organisations syndicales qui ont quitté dès mars les discussions sur le Pacte. Les syndicats n’ont pas été écoutés et des décisions ont été prises sans qu’aucun texte réglementaire ne soit publié.
Donc un projet qui :
• Propose des mesures salariales avec contreparties.
• Fait porter aux personnels la responsabilité d’assumer les défaillances de l’État, alors que les RDC non assurés ne sont qu’une petite partie du problème. Le gouvernement pointe les absences très courtes alors des absences plus longues et prévisibles comme des congés maternité font que des classes restent plusieurs mois sans enseignant à cause de l’absence d’attractivité de nos professions.
• C’est une transformation du système éducatif qui évolue vers un modèle libéral ou les personnels sont mis en concurrence et où les misions et évaluations sont individualisées.
• C’est donc une remise en question de la fonction publique et de nos statuts.

Qui est concerné ? 
Tous les enseignants, CPE et psyEN sont concernés par le Pacte, mais pas les AED ni les AESH, personnels précaires pour lesquels les rémunérations très basses sont un problème majeur.

Les missions
1) Des missions prioritaires (18h/année)
a. Pour le 1er degré : intervention en 6e pour l’approfondissement et le soutien dans le cadre de la réforme de la classe de 6e.
Cela pose des problèmes d’organisation et de surcharge des PE. La réponse du gouvernement est de favoriser le mercredi matin pour l’intervention des PE !
b. Pour le second degré, la mission prioritaire est celle des remplacements en interne, dits remplacements de courte durée (RDC = moins de 15 jours).
c. Le RCD est la priorité. Le chef d’établissement évalue le nombre de mission RCD nécessaires, qu’il est ensuite contraint de distribuer sur l’établissement. On peut donc prévoir que des pressions seront exercées sur les collègues.
2) Des missions moins prioritaires, dont certaines sont définie localement (24h/année)
a. Devoirs faits.
b. Missions qui viennent remplacer les moyens horaires de la DHG, comme par exemple les options. Contenues aujourd’hui dans les services des personnels et dans leur EDT de base, elles pourraient grâce au pacte devenir des heures qui s’ajouteraient au service normal de 18/15h.
c. Stages de réussite pendant les vacances.
3) Des missions non dénombrables en heures et sans chiffrage spécifique (ex : Référents, projets innovants), ce qui laisse la porte ouverte à des définitions locales de projets.

La rémunération
Elle varie en fonction du nombre de parts fonctionnelles (briques). Il est possible de prendre jusqu’à 3 briques (6 en lycée professionnel !) pour 3750 € brut.
Une brique = 1250 euros/an brut, soit 1131 euros net.
Pour une brique de 24h, 1h = 52,08 euros brut
Pour une brique de 18h, 1h = 69,44 euros brut
Rappel HSE : 41,31 € (cert CN), 45,44 € (cert HC et CE), 59,69 € (agr CN), 65,66 (agr HC et CE).
• C’est un peu plus qu’une HSE pour les certifiés, mais un peu moins pour les agrégées !
• Les parts fonctionnelles de 18h sont payées autant que celles de 24 h.
Pour être plus attractif, le pacte est défiscalisé.
Pour la rentrée 2023 les HSE et IMP existent encore et permettent de rémunérer les mêmes missions que celles payées par le Pacte. Cependant, à terme, il n’est pas assuré que cela restera le cas et ces différentes HSE et IMP renteront dans le pacte avec les missions associées.

L’organisation
C’est le chef d’établissement qui décide seul quelles missions sont assurées et qui les assurera.
Le rôle du chef d’établissement sera donc déterminant du début à la fin. C’est lui qui sera décisionnaire et qui suivra le contrat.

  • Le chef d’établissement évalue les besoins qui doivent être couverts par le pacte.
  • Il consulte pour avis le conseil pédagogique.
  • Il lance un appel à candidatures et après les vœux des professeurs, CPE et psy-EN, distribue comme il l’entend les part de pacte.
  • Cette répartition est présentée au CA.
  • Le chef d’établissement fait signer une lettre de mission aux personnels concernés et suit la réalisation des missions qui peut être contrôlée par le rectorat.
  • Les projets de décrets prévoient que si les heures d’une missions ne peuvent pas être réalisées, elles sont basculées sur une autre mission. Si cela n’est n’est pas possible, le pacte est interrompu en cours d’année.

Les problèmes posés par le pacte
Pour les Remplacements de courte durée (RDC) :
• On trouve des discours contradictoires selon les chefs d’établissement car il n’y a pas encore de textes réglementaires. Le ministère ne veut pas écrire noir sur blanc que les RCD seraient obligatoires si on signe le pacte, mais à l’échelle de l’établissement, il ne permet un accès aux autres missions que si toute la partie RCD est assurée.
• Pour l’instant, en fonction des établissements les interprétations sont très diverses. Certains chefs prévoient beaucoup de mission RDC afin de répondre à la commande ministérielle et d’autres, pour rassurer les personnels n’évoquent même pas cette question.
• Ce qui se dessine dans le décret officiel (non encore publié) apparait très contraignant pur les collègues qui auraient signé : les enseignants pactés ne peuvent refuser un RCD qu’en cas d’incapacité dûment justifiée. Donc cette mission sera évaluée et observée de près par les personnels de direction et par l’administration.
• Il peut y avoir aussi des pressions plus importantes sur les personnel les plus fragiles et/ou isolés et les plus susceptibles de répondre aux pressions (les TZR en service incomplet ou encore les collègues non titulaires pour qui il sera difficile de refuser par peur de voir leurs contrats ne pas être renouvelés).
• Les 18 heures représentent les heures devant élèves mais cela va sûrement nécessiter que soient désignées des plages d’astreintes sur lesquelles on pourra solliciter les professeurs, ce qui va dégrader les EDT des collègues pactés ET des collègues non pactés
• Il existe aussi un risque que les chefs d’établissement fassent des EDT à trous pour pouvoir y placer des RDC.
• Ce n’est pas un remplacement : l’heure du professeur absent sera toujours perdue puisque remplacée par un professeur d’une autre discipline.

Un outil de Management dangereux
• C’est un outil de management donnant les pleins pouvoirs aux chefs établissement qui évaluent les besoins. Le conseil pédagogique est seulement consultatif et fait des propositions directement au CA. C’est le chef d’établissement qui fait signer le contrat et c’est lui qui en assure le suivi. Ainsi nous ne serions plus qu’en partie sous statut puisque nous serions aussi sous contrat avec les chefs. Il deviendrait ainsi de plus en plus difficile de faire respecter nos droits. Le statut de fonctionnaire garantit notre indépendance, ce qui n’est pas le cas d’un contrat signé avec le chef d’établissement.
• Si les heures ne sont pas réalisées, il y a une « fongibilité asymétrique » avec idée que les heures d’une mission pourraient être basculées vers une autre mission pour compenser les heures non faites, en particulier d’une mission non prioritaire vers les RCD.
• C’est une contractualisation de notre métier ; les personnels ont une individualisation de leurs rapports avec les chefs ce qui pourrait créer une mise en concurrence entre eux.
• C’est une porte ouverte à l’annualisation de nos services. À terme, c’est tout notre service qui pourrait être comme le pacte défini de manière annuelle et non hebdomadaire, comme le préconise depuis des années la Cour des Comptes, avec un rattrapage de toute heure de cours non assurée, quel qu’en soit le motif (jour férié ou classe en voyage scolaire par exemple).
• On va vers une fonction publique ou la rémunération évolue en fonction du poste et des missions.
• Le pacte accroît les inégalités : des personnels seront écartés d’office du Pacte car il ne sera pas possible pour elle.eux de prendre des missions supplémentaires : ex les femmes, jeunes mères de famille ou jeunes parents, personnes en situation de handicap ou pour des raisons personnelles diverses. Aujourd’hui, les hommes touchent déjà plus d’HSE que les femmes.
Il en est de même pour des motifs de santé ou pour les disciplines qui rendent les RDC plus compliqués à assurer et moins intéressants à proposer.
C’est donc une logique managériale qui est à l’oeuvre avec une obligation des chefs d’établissement d’assurer en priorité les RDC On peut facilement imaginer une mise sous pression lors de l’année du RDV de carrière pour pousser au Pacte en échange d’une bonne évaluation.
• Le risque de marchandage existe : soumettre la possibilité d’obtenir une part pour une autre mission (devoirs faits, projets etc.…) à l’acceptation d’une mission de RDC par les chefs d’établissement.
Une absence de décret ou de texte officiel qui pose beaucoup de questions
• Les chefs d’établissement sont encore dans le flou sur la manière dont cela va se passer et des évolutions sont à attendre entre ce qui sera proposé en fin d’année et la réalité du mois de septembre.
• Quid des heures non effectuées ? Pour le moment, malgré le discours rassurant de certains chefs d’établissements (« On ne sera pas à quelques heures près »), il semble que le service étant annualisé (avec un paiement mensuel) toute heure est due quelles que soient les circonstances : soit le rattrapage est effectué, soit une autre mission est imposée. Dans le cas contraire, un remboursement des heures perçues en trop est possible.
• Pour les projets innovants, des questions se posent qui n’ont pas encore de réponses :
◦ Y aura-t-il assez de parts pour financer les projets ?
◦ Comment seront réparties les parts du pacte si plusieurs personnes sont investies dans le projet ?
◦ Comment le chef d’établissement identifiera-t-il les projets jugés innovants ? Dans certains établissements, on a déjà prévenu qu’il s’agirait de projets lourds, sur tout un niveau ou même pour tout le collège, ou encore que cela ne prenait pas en compte les projets déjà existants …

Le SNES-FSU appelle à refuser collectivement le pacte !